18 juin, journée de la fierté autistique : fier d’être autiste, c’est possible ?

 

En 2005, le collectif anglais « Aspies For Freedom » a lancé une initiative en vue d’informer le grand public sur la neurodiversité. Cette communauté revendiquait le droit à la différence et au respect, en opposition à certaines associations qui prônaient plutôt des traitements pour rendre « normales » les personnes autistes.

Chaque année depuis cette date, la journée du 18 juin est l’occasion de célébrer la « fierté autistique », en particulier dans les pays anglo-saxons. Alors, que penser de cette initiative et de la fierté d’être autiste… ?

Rappel : c’est quoi l’autisme ?

L’autisme n’est pas une maladie, mais une différence neurologique présente dès la naissance. Laurent Mottron, spécialiste de l’autisme, évoque « une organisation cérébrale différente ». Grâce à l’imagerie cérébrale, on voit maintenant comment des mutations sur certains gènes affectent le développement du cerveau et du système nerveux.

On utilise donc le terme « neurotypique » pour désigner le fonctionnement neurologique des personnes qui se situent dans la « norme » (c’est-à-dire la majorité des individus). La « neuroatypie» représente, quant à elle, un fonctionnement neurologique différent de cette norme, en raison de troubles du neuro-développement (TND).

L’autisme fait partie des TND, au même titre que les troubles de l’attention, les troubles des apprentissages, les troubles du développement intellectuel… (plus d’informations sur les TND ici). 

L’autisme est donc avant tout une différence, mais il est aussi reconnu comme un handicap depuis 1996. La sévérité du handicap varie en fonction du contexte et des troubles associés. Un article de ce blog, publié le 11 juin dernier, est consacré à la question de la différence et du handicap (pour lire cet article, cliquer ici).

Peut-on être fier de présenter des troubles du neuro-développement ?

A priori, accoler la fierté à l’autisme peut paraître surprenant… Pourquoi serait-on fier de l’autisme, dans la mesure où il s’agit d’un TND, tel que cela a été expliqué ci-dessus ? Dans ce cas, on pourrait aussi se dire fier de tout et n’importe quoi en lien avec des traits génétiques : fier d’avoir les cheveux ou les yeux de telle ou telle couleur par exemple…

Si l’on considère que le mot fierté signifie la croyance d’être supérieur aux autres (une forme d’arrogance), ou fait référence à un sentiment de satisfaction de soi-même (une forme d’orgueil), alors ne peut pas être fier d’être autiste. Même si les personnes autistes s’avèrent « supérieures » aux neurotypiques dans certains domaines (plus logiques, plus franches ou plus consciencieuses dans leur travail par exemple), elles sont en revanche beaucoup moins douées dans d’autres (communiquer, socialiser, gérer les émotions…). D'une manière générale, aucun être humain ne peut se prétendre supérieur ou inférieur à un autre.

Maintenant, si l’on aborde la notion de fierté sous un autre angle, celui de la conscience de notre propre valeur, de notre dignité en tant qu’êtres vivants et du respect que l’on nous doit, alors la question prend un tout autre sens.

Pourquoi une journée de la fierté autistique ?

À l’origine, l’Autistic Pride Day, initié par la communauté AFF, s’est inspiré d’autres mouvements de revendication des droits, comme la Gay Pride. L’intention n’était donc pas de clamer une quelconque fierté, mais plutôt de montrer qu’il n’y avait aucune raison d’avoir honte de l’autisme, ni de chercher à tout prix à le guérir. Le message était clair : arrêtons de nous cacher, montrons-nous tels que nous sommes et expliquons nos particularités, tout cela dans l’espoir que nos efforts soient reconnus et que nous soyons mieux acceptés dans la société.

Il est vrai que, vus de l’extérieur, les comportements autistiques peuvent paraître ridicules ou immatures au regard des neurotypiques, dont les réactions offusquées ou moqueuses déstabilisent souvent les personnes autistes... Qui n’a jamais ressenti de l’humiliation dans certaines situations problématiques ? Qui n’a jamais été confronté à la honte occasionnée par les « bugs » de communication (réparties inappropriées, incompréhensions mutuelles…), ou à un sentiment d’infériorité en constatant que les autres parviennent facilement à effectuer des tâches qui nous sont difficiles à accomplir.

Ajoutez, à ces situations dévalorisantes, d’autres expériences encore plus traumatisantes, comme les maltraitances, les moqueries, le harcèlement et autres violences subies parfois depuis l’enfance, vous obtenez alors un condensé de risques de voir chuter la confiance en soi et l’estime de soi chez les personnes autistes.

Finalement, cette journée de la fierté autistique est une occasion à saisir pour relever la tête, assumer ses particularités et revendiquer le droit au respect. C’est une occasion d’expliquer en quoi consiste notre différence et les difficultés qu’elle génère, d’exprimer nos besoins et nos souhaits d’une inclusion compréhensive et bienveillante.

Comment la célébrer ? Puisque les TSA revêtent de multiples facettes selon la personnalité de chaque personne concernée, alors libre à chacun d’inventer la façon qui lui conviendra le mieux pour s’exprimer ce samedi 18 juin 2022. 😉


 

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